Les Miniaturas lunares de Gerardo Jerez Le Cam suggèrent une perception fragmentée, momentanée, presque fugace d’une lune blanche et élusive en même temps. La variété et la récurrence font de chaque moment musical un instant impossible qui ne se répétera pas, il est dans le présent et il ne sera pas à nouveau.
Il ne s’agit pas d’une célébration de la beauté que la lune illumine mais plutôt d’un témoignage de ce qu’elle ne montre pas ou de ce qu’elle laisse imaginer dans une fraction très brève de temps, mais qui ne sera pas accordé.
C’est l’essence de l’art de la brièveté : suggérer ce qui n’est pas là, ce qui ne peut être là. Je pense à une poétesse argentine, Alejandra Pizarnik, qui dit « tant de fragments nous déchirent ». La conscience du fragment est douleur, lucidité et notion de ce qui n’est pas possible.
La fusion de styles suggère aussi une réflexion : il existe des systèmes supra-ordonnateurs qui permettent à des mélodies quasi grégoriennes de cohabiter avec un cymbalum, un geste de tango, un geste bachien.
Des morceaux à écouter en état d’étonnement.
Fabian Panisello
Compositeur, chef d’orchestre
Directeur de l’École supérieure de musique Reine-Sophie de Madrid.